Skip to main content
Diana De Faveri :
Elle m’insultait, me lançait des objets et me disait « laisse-moi tranquille » et « je sais ce que je fais et toi, tu es une idiote ». Et elle continuait sans arrêt. C’était épuisant émotionnellement et mentalement. Je suis surprise d’avoir tenu le coup jusqu’ici sans faire de dépression nerveuse.

Allison Sekuler :
Vous venez d’entendre Diana DeFaveri. Lorsque sa mère a développé une démence, son comportement a radicalement changé. Comme vous allez le découvrir, ces types de changement sont courants chez les personnes atteintes de démence. Mais, il y a de l’espoir. Il existe en effet des moyens de comprendre ces comportements et de les gérer.

Jay Ingram :
Bienvenue à Défier la démence. Le balado pour quiconque a un cerveau.
Allison Sekuler :
Défier la démence, c’est vivre de manière à garder son cerveau en santé et à réduire les risques de démence.

Jay Ingram :
Aujourd’hui, nous abordons l’un des défis les plus difficiles auxquels nous pouvons être confrontés lorsque nous prenons soin d’une personne atteinte de démence. Comment réagir face à des comportements difficiles qui semblent surgir de nulle part?

Allison Sekuler :
Nous parlons ici de comportements inhabituels, comme la résistance aux soins, à la prise de repas et de médicaments. Les agressions physiques. L’agitation ou la paranoïa, voire l’errance.

Jay Ingram :
Ces comportements peuvent être effrayants, épuisants et déchirants, mais ils ne sont pas nécessairement ce qu’ils semblent être, à savoir des gestes de méchanceté ou d’agressivité. Ce sont des symptômes de la démence et des signes qui indiquent souvent un besoin ou une détresse. Je m’appelle Jay Ingram. Je suis journaliste, écrivain et communicateur scientifique. Je m’intéresse à la démence depuis plus de 25 ans.

Allison Sekuler :
Je m’appelle Allison Sekuler. Je suis présidente et scientifique en chef à l’Académie de recherche et d’éducation Baycrest et au Centre d’innovation sur la santé du cerveau et le vieillissement. Joignez-vous à nous pour défier la démence. Parce qu’il n’y a pas d’âge pour prendre soin de son cerveau.

Jay Ingram :
Aujourd’hui, nous nous intéressons aux symptômes comportementaux et psychologiques de la démence. Si une personne de votre entourage est atteinte de démence, ou si vous vous occupez d’une personne à domicile, cette émission vous est destinée.
 
Allison Sekuler :
Sensibiliser le public à ces comportements est essentiel pour défier la démence. Il est nécessaire de les déstigmatiser, car ce ne sont pas véritablement de mauvais comportements et ils ne définissent pas la personne. Ce sont simplement des symptômes de la maladie. Les recherches montrent que, selon le lieu de résidence ou le milieu de soins, entre 50 et 90 % des personnes atteintes de démence en feront l’expérience.

Jay Ingram :
Apprendre à reconnaître ces comportements et à y réagir est également essentiel pour défier la démence. C’est une démarche qui peut améliorer le bien-être de la personne atteinte de démence et de ses proches aidants.

Allison Sekuler :
Comme nous l’avons déjà dit, prodiguer des soins peut être un facteur de risque de démence, car il est très difficile de prendre soin de soi lorsqu’on s’occupe des autres. L’isolement social ou le manque de sommeil entrent aussi en jeu lorsqu’une personne devient la principale source de soins pour un parent ou un proche atteint de démence.

Jay Ingram :
Pour défier cet aspect de la démence, commençons par quelques notions de base sur le comportement. Dans le contexte de la démence, les cellules cérébrales meurent et le cerveau rétrécit. Ce phénomène affecte la façon dont une personne pense, agit et interprète le monde qui l’entoure. Elle peut percevoir les choses différemment, mal comprendre ce qui se passe ou rencontrer des difficultés à exprimer ses besoins.

Allison Sekuler :
C’est pourquoi les défenseurs des personnes atteintes de démence et les professionnels de la santé considèrent ces comportements difficiles comme des réactions à des éléments significatifs dans l’environnement de la personne, qu’ils soient physiques, sociaux ou émotionnels. Les spécialistes de la santé qualifient souvent ces comportements de « réactifs », car ils sont perçus comme des réactions à des besoins non satisfaits ou à des sentiments que la personne n’est peut-être plus en mesure de communiquer autrement.

Jay Ingram :
Par exemple, le comportement violent d’une personne qui repousse un proche aidant peut être dû à plusieurs facteurs, notamment la douleur, la confusion, la peur, voire la manière dont quelque chose a été dit ou fait.

Allison Sekuler :
Pour gérer ces comportements, il peut être nécessaire de mener une petite enquête afin de déterminer quel besoin n’est pas satisfait et de l’anticiper avant qu’il ne devienne un problème. Cependant, malgré tous les efforts, la cause reste parfois obscure.
 
Jay Ingram :
Plus tard dans l’émission, nous vous donnerons quelques conseils pratiques sur la manière de gérer les comportements réactifs. Mais tout d’abord, voici l’histoire d’une aidante.

Allison Sekuler :
Diana DeFaveri a 56 ans et vit à Woodbridge, en Ontario. Elle dirige une entreprise familiale d’aménagement paysager que son père a créée il y a près de quarante ans. Lorsqu’un nouveau lotissement est construit, l’équipe de Diana s’active sur les terrains pour les niveler et les recouvrir de gazon. Diana est également mère de deux enfants adultes et s’occupe de sa mère, Elisa, âgée de 86 ans. En 2022, Elisa a reçu un diagnostic de syndrome corticobasal. Il s’agit d’une forme rare de démence qui provoque la mort des cellules cérébrales, entraînant une perte progressive des capacités motrices, cognitives et linguistiques. Pendant un certain temps, Diana s’est également occupée de son père, atteint d’un mélanome malin. Comme vous allez l’entendre, ces responsabilités cumulées ont entraîné des conséquences et déclenché chez sa mère des comportements qui ont profondément affecté Diana. Il y a encore une chose que vous devez savoir à propos de Diana : en plus de toutes ses activités, elle est agricultrice à temps partiel dans la mini-ferme de 10 acres où elle vit. Diana DeFaveri nous parle depuis Woodbridge, en Ontario. Diana, merci de nous aider à défier la démence.

Diana De Faveri :
Merci de m’avoir invitée. Je suis heureuse de participer à cette discussion.

Allison Sekuler :
Nous aimerions en savoir plus sur votre mère et votre expérience en tant qu’aidante mais, avant cela, pourriez-vous nous parler un peu de vous? Vous dirigez une ferme et une entreprise d’aménagement paysager, j’imagine donc que vous êtes douée pour réparer des choses.

Diana De Faveri :
En effet. Je suis en effet très douée pour réparer des choses. Mon père a toujours pensé que, lorsqu’on entreprend quelque chose, il faut le faire correctement. Par exemple, quand on obtient son permis de conduire, il ne suffit pas d’apprendre à conduire une voiture, il faut également savoir changer l’huile et remplacer un pneu crevé. Ma mère était du même avis. Dans cette maison, on ne se contentait pas de manger. On apprenait à cuisiner, à laver la vaisselle et faire la lessive. Dès notre plus jeune âge, on nous a appris à accomplir toutes sortes de tâches et à comprendre qu’il n’était pas nécessaire de payer quelqu’un d’autre pour les réaliser à notre place si on pouvait les faire nous-mêmes. C’est comme cela que mon frère et moi avons été élevés.

Jay Ingram :
Parlez-nous de votre mère, Elisa. Quel genre de personne était-elle avant son diagnostic?

Diana De Faveri :
Oh, mon Dieu. C’était une femme extraordinaire. Elle savait tout faire. Elle fendait du bois et s’occupait du jardin. Elle avait aussi une petite ferme. Elle prenait soin de ses trois enfants et de ses huit petits-enfants. Elle allait partout en voiture. Elle était très indépendante. C’était une personne très sociable. Sa vie sociale était plus riche que la mienne quand j’étais adolescente. Mes amis préféraient ses fêtes aux miennes. Elle était pleine d’entrain et très divertissante. C’était vraiment une femme extraordinaire.

Jay Ingram :
Diana, avant le diagnostic de votre mère, vous avez également pris soin de votre père jusqu’à la fin. Nous sommes sincèrement désolés d’apprendre le décès de votre père.

Diana De Faveri :
Merci.

Jay Ingram :
Quel type de soin lui prodiguiez-vous?

Diana De Faveri :
En 2018, j’étais en vacance à la plage avec mes parents et j’ai remarqué cette tache ronde… De la taille d’une pièce de deux dollars sur son torse. C’était une croûte qui s’est avérée être un mélanome malin. C’est là que tout a commencé. Comme mon père parlait presque exclusivement italien, la barrière de la langue constituait un problème. Je l’ai donc accompagné à tous ses rendez-vous médicaux. J’étais sa principale personne de confiance. Depuis mon enfance, mon père et moi étions très proches. Il prenait soin de moi et je prenais soin de lui. Je pensais simplement que les choses devaient se passer ainsi. Donc, lorsque mon père avait besoin qu’on lui coupe les ongles d’orteil, je le faisais. Et s’il avait besoin d’une coupe de cheveux, je faisais de mon mieux. Je faisais beaucoup de choses pour lui.

Allison Sekuler :
Et quel événement vous a incitée à emmener votre mère chez le médecin pour vérifier la santé de son cerveau?

Diana De Faveri :
En 2021, nous avons remarqué que ma mère avait eu un comportement inhabituel. Elle rentrait en voiture de chez sa sœur et s’est perdue, j’ai donc dû aller la chercher. Nous avons trouvé cela étrange. Plus tard dans l’année, elle est allée faire des courses et, après avoir placé ses achats dans sa voiture et rapporté son panier, elle ne se souvenait plus où elle s’était stationnée. C’était en pleine pandémie de COVID-19. Elle marchait dans tous les sens à la recherche de sa voiture. Un homme l’a remarquée et lui a demandé ce qui n’allait pas. Elle lui a répondu qu’elle ne trouvait pas sa voiture. Elle lui a alors demandé de la conduire chez elle. Ce qu’il a fait. J’étais au travail quand j’ai reçu un appel de ma mère qui m’a raconté ce qui s’était passé et que quelqu’un l’avait raccompagnée chez elle. Je lui ai demandé de qui il s’agissait. Elle m’a répondu : « Il est ici. Parle-lui. » Cet inconnu se trouvait donc chez ma mère. Je ne savais pas qui il était. Les choses auraient pu très mal tourner ce jour-là. Quoi qu’il en soit, il a eu la gentillesse de raccompagner ma mère chez elle et de lui rendre ses clés. J’ai dû me précipiter à la maison. À ce moment-là, je lui ai dit : « Maman, quelque chose ne va pas, je pense que tu ne devrais plus conduire. »

Allison Sekuler :
Elle a donc reçu un diagnostic de syndrome corticobasal, une forme rare de démence qui provoque la mort des cellules cérébrales. Quels étaient les symptômes? Comment le syndrome corticobasal a-t-il affecté la mémoire et les capacités cognitives de votre mère?

Diana De Faveri :
C’était étrange, car elle reconnaissait les gens. Même si elle n’avait pas vu quelqu’un depuis des années, dès que cette personne entrait dans la pièce, elle la reconnaissait. Elle était consciente de ce qui lui arrivait. Elle savait qu’elle ne pouvait se souvenir de certaines choses. Par exemple, si elle marchait dans le couloir et que je lui disais : « Maman, tourne à gauche dans le couloir », elle était perdue. Elle ne comprenait pas ce qu’elle devait faire. Puis, sa démarche est devenue plus saccadée. Quand elle devait faire demi-tour, elle n’arrivait plus à bouger aussi bien qu’avant. Cela m’a semblé étrange. Elle souffrait de démence, mais se rappelait des gens et de ce qu’elle avait fait la veille. Elle se souvenait de choses dont je pensais qu’une personne atteinte de démence ne se souviendrait pas.

Jay Ingram :
Pourtant, des symptômes inhabituels se sont développés. Comment son comportement a-t-il changé après son diagnostic de syndrome corticobasal?

Diana De Faveri :
Son comportement était donc l’un des principaux problèmes auxquels nous devions faire face. Elle était très en colère et très rancunière, je dirais même jalouse depuis un certain temps, car elle voyait la façon dont je m’occupais de mon père. Il faut savoir que ma mère a toujours été la figure centrale de la famille. Elle a toujours pris soin de tout le monde. Elle a toujours tout fait toute seule et, soudain, elle se retrouvait dans l’incapacité d’agir et me voyait accomplir ces tâches à sa place. Ça ne lui plaisait pas. Avec le recul, je pense que c’était presque de la jalousie. Et plus je m’occupais de mon père, plus cela la mettait en colère. Au point de me jeter des objets. Elle passait ses journées à m’insulter. Elle se disputait avec mon père. Il avait un cancer de stade trois et ses capacités étaient limitées, mais elle ne comprenait pas pourquoi il restait assis sur le canapé toute la journée. Elle lui disait de se lever pour tondre la pelouse, ou encore s’occuper d’autre chose. Elle ne pouvait pas comprendre cet aspect des choses.

Et la situation est devenue horrible. Je ne trouve pas d’autre mot pour décrire cette période de notre vie. C’était tout simplement horrible. Cela m’a amenée à en vouloir à ma mère. Je ne comprenais pas pourquoi elle était si en colère. J’étais là pour l’aider, et elle faisait en sorte de me rendre terriblement malheureuse.

Jay Ingram :
Et vous décrivez ce comportement comme étant de la colère, peut-être due à la jalousie. Y avait-il d’autres aspects de ce comportement qui étaient inhabituels chez votre mère?
 
Diana De Faveri :
Oui. Elle ne m’avait jamais lancé d’objets. Elle ne m’avait jamais crié dessus ni insultée. Elle disait maintenant des choses comme « Maudit soit le jour où tu es née ». Des choses vraiment méchantes. Elle regardait mon père et lui lançait : « J’espère que tu auras une mort lente et misérable. » Elle tenait des propos qui ne lui ressemblaient absolument pas, et cela bouleversait tout le monde.

Allison Sekuler :
Quelle incidence cela a-t-il eue sur vous et votre père?

Diana De Faveri :
Mon père a lui aussi commencé à éprouver du ressentiment à son égard, et ils se disputaient constamment. Mon père était présent sur le plan cognitif, mais il souffrait tellement – il n’avait pas besoin qu’on lui crie dessus. De mon côté, j’ai commencé à détester ma mère. Je détestais tout chez elle. Je ne voulais plus la voir. J’ai même dit à mes proches : « Écoutez, le jour où papa mourra, je ne veux plus avoir affaire à maman. Elle est à vous. Je ne veux plus rien savoir d’elle. » Je ne pouvais plus la supporter. Il y avait des jours où je montais dans ma voiture et je me mettais à crier, car j’avais besoin d’évacuer toute ma frustration.

Jay Ingram :
Je comprends qu’il n’est pas facile d’aborder ce sujet, mais ce changement de comportement, cette colère, étaient-ils constants?

Diana De Faveri :
Oui. Sans arrêt. Elle ne lâchait pas prise. Elle faisait quelque chose et j’essayais de la corriger. Il ne faut jamais corriger une personne atteinte de démence, car cela ne fait qu’empirer les choses. Donc, quand j’essayais de corriger certains de ses comportements, elle se retournait et m’insultait, me lançait des objets et me disait « laisse-moi tranquille », « je sais ce que je fais » et « tu es une idiote ». Elle continuait ainsi sans arrêt. C’était épuisant émotionnellement et mentalement. Je suis surprise d’avoir tenu le coup jusqu’ici sans faire de dépression nerveuse. C’était à ce point-là.

Allison Sekuler :
Wow. Cela a dû être très difficile à vivre.

Diana De Faveri :
En effet. Parce que j’etait la, seule, à m’occuper de mes deux parents, pas seulement de l’un d’entre eux, mais des deux. Et on me traitait de cette manière. Je faisais de mon mieux, mais cela ne convenait pas à ma mère. Elle était plus heureuse lorsque je n’étais pas là. Mais elle ne pouvait pas se débrouiller sans moi.

Allison Sekuler :
Je comprends. Avez-vous déjà cherché de l’aide pour faire face à ce comportement, par exemple en vous rendant à un groupe de soutien pour les proches aidants ou autre chose?

Diana De Faveri :
Non, mais j’ai consulté un neurologue, qui m’a aiguillée vers un médecin de la clinique Baycrest. J’ai consulté plusieurs médecins là-bas, qui ont modifié ses médicaments, lui en ont prescrit de nouveaux et lui en ont retiré d’autres. C’était une question d’essais-erreurs. Les médicaments l’aidaient, mais son comportement ne changeait pas. Ce n’est qu’après le décès de mon père que tout a basculé. Tout à coup, elle s’est calmée. Elle souhaitait que je sois toujours à ses côtés. Elle était affectueuse. Je ne comprenais pas. C’était littéralement comme si un déclic s’était produit. Mon père est décédé, et le lendemain, ma mère est redevenue normale. Ses problèmes de comportement avaient disparu.

Jay Ingram :
Wow. C’est vraiment incroyable. Et je suppose que c’est ce qui vous a amenée à penser que la jalousie pouvait être à l’origine du changement radical de comportement qu’elle avait affiché.

Diana De Faveri :
Oui. C’est pourquoi, en y repensant, je crois que c’était bien cela. C’était de la jalousie, et elle n’aimait pas le fait de perdre le contrôle de son domaine. Elle détestait tous ceux qui se trouvaient sur son chemin. Comme j’étais la seule personne présente, elle s’en est prise à moi. Quand mon père s’en est allé, ça s’est arrêté d’un seul coup. C’était incroyable. Je n’arrivais pas à comprendre ce changement radical d’un jour à l’autre.

Allison Sekuler :
Comment va votre mère maintenant?

Diana De Faveri :
Elle n’a aucun problème de comportement, si ce n’est qu’elle pleure beaucoup. Elle est toujours très émotive. Ce n’est toutefois rien comparé à ce qu’elle était lorsque mon père était encore en vie. Sa seule activité maintenant est le coloriage, et encore, elle y arrive difficilement. « Quelle couleur dois-je utiliser et que dois-je colorier? » Elle répète sans cesse la même question.

Jay Ingram :
Mais elle n’est pas en colère?

Diana De Faveri :
Non, elle n’est pas en colère. Les seules fois où elle se met en colère, c’est lorsqu’elle pense à la situation dans laquelle elle se trouve actuellement. Elle se rend compte que quelque chose ne va pas chez elle, mais elle ne s’emporte jamais contre quelqu’un. Elle ne se fâche jamais plus contre moi. Elle est très heureuse de me voir maintenant. Elle veut me serrer dans ses bras et m’embrasser. Il faut savoir que ma mère ne m’a jamais embrassée ni serrée dans ses bras de toute ma vie, et maintenant elle le fait.

Allison Sekuler :
Comment vous sentez-vous à présent?

Diana De Faveri :
Je vais bien maintenant. Je me sens beaucoup mieux. Nous avons engagé des personnes préposées aux services de soutien à la personne. Elles sont là jour et nuit, car je ne pouvais plus dormir là-bas. Elles sont donc présentes en permanence. Je vais chez elle deux fois par jour, le matin et après le travail. J’essaie de dîner avec ma mère deux à trois fois par semaine, voire plus. J’essaie de passer autant de temps que possible avec elle.

Allison Sekuler :
Très bien. Tout à l’heure, vous disiez que cela semblait presque personnel, mais maintenant, avec le recul, on dirait que vous ne le pensez plus.

Diana De Faveri :
Non. On oublie un peu parce qu’on sait que ce n’était pas elle, c’était la démence, c’était ce qui se passait dans son cerveau. Il faut comprendre que c’était nouveau pour elle aussi. Elle ne savait pas ce qui se passait dans son esprit. Elle n’en avait aucune idée. Et, quelle que soit la manière dont elle devait se comporter, elle le faisait. Je suis simplement heureuse que la situation ait changé et que nous puissions aller de l’avant. Je n’éprouve plus de haine envers ma mère. J’ai l’impression d’avoir retrouvé ma vie, car, pendant trois ans, je n’en avais plus. Mon quotidien se résumait au fait de m’occuper de mes parents. J’ai dû mettre ma vie entre parenthèses, ce qui a été très traumatisant pour moi. J’ai 56 ans, je viens de vivre une séparation et je souhaite commencer à profiter de la vie.  Je ne pouvais pas avant. Je devais m’occuper de mes parents.

Cela dit, ce furent les trois pires années de mon existence. Maintenant que les problèmes de comportement de ma mère sont résolus, j’ai l’impression d’avoir retrouvé ma vie. Cependant, j’ai tiré une grande leçon de vie que j’essaie de transmettre à mes enfants. Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve, et je pourrais devenir comme ma mère. Je détesterais que cela arrive. À l’époque, c’était un sujet tabou dont personne ne parlait, mais aujourd’hui, je souhaite que mes enfants comprennent que, si quelque chose devait arriver, il y a des choses à faire : plans A, B et C. Je suis donc satisfaite que nous soyons tous sur la même longueur d’onde et que tout le monde semble un peu plus détendu qu’il y a trois ans.

Jay Ingram :
Vous avez vécu une expérience éprouvante. Diana, avez-vous un conseil à donner aux proches aidants ou aux personnes qui pourraient le devenir, à partir de votre expérience?

Diana De Faveri :
Oui. Peu importe à quel point vous pensez être extraordinaire, lorsqu’il s’agit de s’occuper d’une personne atteinte de démence ou d’Alzheimer, vous avez besoin d’aide. Et n’hésitez pas à la demander. Vous ne pouvez pas y arriver seul. Vous allez vous rendre malade avant d’y parvenir.

Allison Sekuler :
Merci beaucoup de nous avoir fait part de votre expérience.

Diana De Faveri :
Merci.

Jay Ingram :
Oui, merci.

Allison Sekuler :
Diana DeFaveri est mère, aidante, agricultrice à temps partiel et propriétaire d’une entreprise d’aménagement paysager. Elle nous a parlé depuis Woodbridge, en Ontario.

Jay Ingram :
Notre prochaine invitée a écouté Diana. Nicole Didyk est gériatre consultante à l’hôpital Cambridge Memorial, à Cambridge, en Ontario, où elle pose des diagnostics et soutient des personnes atteintes de démence. Elle aide également les proches aidants à gérer les comportements réactifs. Elle est professeure adjointe d’enseignement clinique à l’Université McMaster. Dans ses temps libres, elle est aussi youtubeuse. Sa chaîne YouTube, The Wrinkle, est consacrée à la santé des personnes âgées, et elle n’hésite pas à aborder des sujets comme l’incontinence et la sexualité à un âge avancé. Docteure Nicole Didyk nous parle depuis Waterloo, en Ontario. Docteure Didyk, merci de nous aider à défier la démence.

Nicole Didyk :
Merci de m’avoir invitée. Tout le plaisir est pour moi.

Jay Ingram :
Qu’est-ce qui vous a frappée dans l’histoire de Diana?

Nicole Didyk :
J’ai trouvé l’histoire de Diana vraiment excellente. Elle est très représentative des types de comportements réactifs que je constate dans ma pratique. Elle me rappelle que le proche aidant s’y connaît mieux que quiconque en matière de comportements réactifs. Diana l’a illustré à merveille. Elle a su nous raconter tout ce qu’il y avait à savoir sur sa mère, comme son éducation, son rôle central au sein de sa famille, ses relations avec son mari et ses enfants. La première étape pour définir et traiter un comportement réactif consiste donc à déterminer qui est la personne, car nous devons comprendre ce qui se cache derrière ce comportement.

Jay Ingram :
Avez-vous une idée de la raison pour laquelle le comportement de la mère de Diana a soudainement cessé après le décès de son père?

Nicole Didyk :
C’est fascinant. D’une certaine manière, cela semble tout à fait logique, car l’une des approches pour traiter un comportement consiste à trouver son déclencheur. Il y a presque toujours un antécédent. Que se passe-t-il donc avant que le comportement ne se manifeste? Il est possible que, lorsque le déclencheur disparaît, lorsque le mari décède, le comportement s’atténue. Dans un sens, cela semble tout à fait logique. Mais cela demeure fascinant.

Allison Sekuler :
Au début de l’émission, nous avons mentionné qu’entre 50 et 90 % des personnes atteintes de démence présentent ce type de comportement réactif. Pourriez-vous nous dire quels sont les comportements les plus courants et les plus marquants que vous observez au quotidien dans votre pratique clinique?

Nicole Didyk :
Une partie de la réponse dépend de ce que nous considérons comme un « comportement » ou comme un simple « symptôme » de la démence. C’est un comportement si le proche aidant le perçoit comme tel. Un exemple courant est le fait de poser sans cesse les mêmes questions. Poser sans cesse les mêmes questions ou répéter sans cesse la même chose est un symptôme très naturel de la maladie d’Alzheimer, qui affecte la mémoire à court terme. Pour un proche aidant, cela peut être extrêmement fatigant et frustrant. Mais la personne atteinte de démence pense qu’elle n’a jamais posé cette question auparavant. Il est donc tout à fait possible, lorsque nous plongeons dans son monde, de voir les choses de son point de vue. Parfois, une personne atteinte de démence se présente à mon bureau avec sa famille qui me demande : « Pouvez-vous lui dire d’arrêter de faire cela? » C’est une excellente occasion d’expliquer la situation : « Cette personne fait de son mieux. Elle vit avec la démence et fait tout ce qu’elle peut dans cette situation. C’est donc à vous que revient d’apprendre à modifier votre approche face à ce comportement. »

Allison Sekuler :
Pourriez-vous nous donner un exemple de comportement courant, mais très difficile, sur lequel vous avez conseillé des personnes, et nous expliquer comment vous les avez aidées à y faire face?

Nicole Didyk :
Le questionnement répétitif est très courant. Nous essayons également de mieux décrire ce que l’on appelle l’errance, car les gens qui errent cherchent quelque chose. La personne ne va pas sans but. Souvent, elle cherche à se rendre à son travail ou à rentrer chez elle. Il se peut que ce soit la maison où elle a grandi, il y a 40 ou 50 ans. Il est donc très courant qu’elle essaie de sortir et de partir. Ce comportement peut naturellement être très inquiétant, car la personne peut décider de partir à un moment inopportun, par exemple au milieu de la nuit. Elle peut aussi partir par mauvais temps. Cette situation peut être très perturbante pour les personnes qui l’entourent. Nous souhaitons donc d’abord définir ce comportement. Ne le qualifiez pas d’errance, mais plutôt de « préparation pour aller travailler » au milieu de la nuit. Ensuite, il convient de déterminer comment y répondre sans recourir immédiatement aux médicaments. Notre première approche consiste toujours à déterminer ce que nous pouvons faire sur le plan comportemental et environnemental pour que ce comportement soit moins pénible ou problématique. C’est par là que nous commençons. Parfois, il faut mener une petite enquête pour trouver la solution.
 
Jay Ingram :
Ces deux exemples, Nicole, me semblent provenir de la démence elle-même, des questions répétitives, le fait de penser qu’il faut aller travailler. Toutefois, il existe des exemples de comportements réactifs qui semblent, même aux yeux des membres de la famille, être un changement radical par rapport au comportement habituel de la personne. Comment gérez-vous ces situations?

Nicole Didyk :
C’est très intéressant, et je pense que vous l’avez mentionné. Cela ressemble à un changement radical, mais, si nous commençons par la personne et que nous creusons davantage pour en savoir plus sur ses antécédents ou son comportement antérieur, nous pouvons parfois trouver un indice. Par exemple, cette semaine, j’ai vu une personne qui se levait au milieu de la nuit et qui, au lieu d’aller aux toilettes, se soulageait dans un placard ou parfois simplement sur le sol près du lit. Les membres de sa famille n’avaient jamais observé un tel comportement auparavant. Mais, après avoir approfondi la question et observé son comportement à plusieurs reprises, nous avons découvert que, lorsqu’il était enfant et vivait à la ferme, il y avait un pot de chambre près de son lit. Ainsi, même si, au milieu de la nuit, on l’invitait à se rendre aux toilettes, il préférait utiliser son pot de chambre et retourner se coucher. Nous avons donc pu installer une chaise percée à son chevet. Celle-ci est différente du modèle traditionnel, il en existe une version moderne, lavable et hygiénique, conçue à des fins médicales. Lorsqu’il se levait au milieu de la nuit pour se soulager, il était satisfait de l’utiliser, car cela lui évitait de devoir traverser tout le couloir pour se rendre aux toilettes.

Jay Ingram :
C’est un excellent exemple de ce qui peut sembler mystérieux, mais qui comporte en réalité une explication. Rencontrez-vous des cas où il est impossible de comprendre d’où vient le comportement réactif?

Nicole Didyk :
Oui. Je dirais que certains comportements restent mystérieux. Cela peut être frustrant, mais ça signifie simplement qu’il faut replonger dans le monde de la personne, accepter le comportement tel qu’il est. C’est une réaction que nous ne comprenons pas tout à fait et nous partons simplement de là.

Allison Sekuler :
Dans certains cas, nous avons entendu des personnes dire : « La personne que j’aime, qui est normalement très gentille, se met soudainement à dire des choses horribles que je ne lui ai jamais entendu dire auparavant. » Dans ces cas-là, les personnes concernées réagissent parfois en éprouvant presque de l’antipathie pour la personne, ou en se demandant si c’est vraiment ce qu’elle a pensé d’elles pendant toutes ces années sans jamais le dire. Dans ce genre de situation, quels conseils donneriez-vous aux personnes concernées?

Nicole Didyk :
C’est effectivement un élément qui ressort de l’histoire de Diana. À cause du comportement de sa mère, elle a commencé à prendre les choses très à cœur. Il est facile de dire : « Ne le prenez pas personnellement, c’est la maladie. Ce n’est pas la personne ». Cependant, cela peut être difficile à faire. Dans ma pratique, je constate parfois que je peux établir un lien avec la démence et dire, par exemple, que si une personne est atteinte de démence frontotemporale, les lobes frontaux du cerveau sont davantage touchés. Or, les lobes frontaux nous aident à nous mordre la langue lorsque nous ne voulons pas dire quelque chose. Il se peut donc que la personne devienne désinhibée et que ces pensées et ces sentiments se manifestent. Ce n’est pas nécessairement une affaire personnelle. La colère et la virulence peuvent être dirigées vers la situation.

Dans le cas de la démence à corps de Lewy, il s’agit d’un type de démence qui affecte davantage les lobes pariétaux. Le processus pathologique est différent. Les personnes atteintes sont donc plus susceptibles d’avoir des hallucinations visuelles et des fluctuations.

Et si l’on considère la maladie d’Alzheimer classique, on constate que c’est à nouveau l’hippocampe et le lobe temporal qui sont touchés. Cela affecte donc la mémoire à court terme et le langage. Il est donc souvent utile d’établir ces corrélations biologiques.

Jay Ingram :
Nicole, nous avons principalement discuté des changements difficiles à gérer ou désagréables à supporter pour les proches. Cependant, le contraire peut-il se produire? Avez-vous observé des personnes atteintes de démence devenir soudainement plus amicales, aimables ou amusantes par exemple?

Nicole Didyk :
Oui. J’ai de nombreuses anecdotes de ce type. Quelqu’un m’a raconté que sa mère, qui était toujours très réservée, avait développé un goût pour les choses voyantes. Elle a donc commencé à porter des tenues aux couleurs plus vives et plus originales, qui ont alimenté les conversations. Des gens peuvent trouver que cette désinhibition, qui les rend plus affectueux, est un effet secondaire souhaitable. J’ai même entendu parler de personnes qui se servent de leur déficience de la mémoire à court terme pour revivre de beaux moments. Par exemple, si une personne apprend que son petit-enfant attend un bébé et qu’elle oublie qu’on le lui a déjà dit 20 fois, chaque fois qu’elle entend cette nouvelle, c’est comme si c’était la première fois qu’on la lui annonçait. Il y a donc clairement un envers à ces réactions difficiles.

Allison Sekuler :
C’est agréable à entendre. Vous avez dit précédemment que les médicaments ne sont pas nécessairement la première ligne de défense, mais comment envisagez-vous la prescription de médicaments comme solution possible?

Nicole Didyk :
C’est une excellente question, puisque, en tant que médecin et gériatre, l’un de mes principaux outils est la prescription de médicaments. Nous appliquons quelques règles d’or. La première est que les médicaments n’agissent pas seuls. Comme pour la plupart des troubles cérébraux, nous devons associer les médicaments à des solutions non médicamenteuses. Nous devons toujours réfléchir à l’environnement et à la réaction des proches aidants lorsque nous prescrivons des médicaments. C’est la première règle, mais ce n’est pas la seule solution. Nous devons le faire dans le cadre de l’ensemble du programme. Le principe, en gériatrie, est que nous devons toujours commencer par une faible dose. Il faut l’augmenter progressivement et fixer un objectif en matière de symptômes, que nous réévaluerons. Il est évident que nous devons également reconnaître que le comportement n’est généralement pas permanent. Nous devons donc toujours réévaluer et nous demander si ce médicament est toujours nécessaire. Il est possible que nous commencions à le diminuer progressivement et que la démence de la personne ait évolué, de sorte que nous n’ayons plus besoin de l’employer et que nous n’ayons plus à tolérer les risques liés à l’utilisation de ce médicament.

Jay Ingram :
Les comportements réactifs, notamment ceux que l’on pourrait qualifier de négatifs, ont une incidence considérable, et pas seulement sur les proches aidants directs. De plus, ils sont souvent associés à une forte stigmatisation. Quel est l’impact de la stigmatisation de ces comportements?

Nicole Didyk :
Il existe plusieurs niveaux de stigmatisation en matière de comportements réactifs. Il est normal qu’un proche aidant souhaite garder à la maison une personne qui présente un comportement incompréhensible pour les autres, afin d’éviter que celui-ci se manifeste en public. Mais cela ne fait qu’aggraver le stress, l’anxiété et l’isolement du proche aidant. Je suis toujours heureuse de savoir qu’une personne atteinte de démence et pouvant avoir des réactions inhabituelles vit au sein de la collectivité, car il est préférable que ces personnes soient intégrées dans la société afin que nous puissions normaliser la situation. Il s’agit d’un aspect normal et très courant de la démence Et la démence est une maladie fréquente malgré tous nos efforts pour la défier. Elle est actuellement très répandue dans notre monde. Nous devons donc voir la maladie dans la société afin de mieux la comprendre.

Allison Sekuler :
Nicole, nous avons souvent mentionné que le fait de prodiguer des soins peut constituer un facteur de risque de démence pour les proches aidants. Ils peuvent être plus stressés ou, comme vous l’avez souligné, plus isolés. Lorsque vous discutez avec des proches aidants à domicile, quels conseils leur donnez-vous pour les aider à gérer leurs émotions et leur bien-être?

Nicole Didyk :
Je pense qu’il est toujours important pour les proches aidants de ne pas s’oublier, de prendre soin d’eux-mêmes, même si cela peut sembler banal, c’est pourtant vrai. Si vous ne prenez pas soin de vous, si vous n’êtes pas en bonne santé, vous ne pouvez pas vous occuper des autres. Il est donc tout à fait acceptable de prendre quelques minutes pour sortir de la pièce, respirer profondément et se recentrer. Ces simples stratégies peuvent s’avérer très précieuses. Dans ma pratique clinique, je constate que je répète sans cesse certaines phrases aux proches aidants, car ils sont submergés, même lorsqu’ils sont dans mon bureau. Je peux simplement leur donner quelques conseils simples, voire un mantra qu’ils peuvent répéter.

J’apprécie la façon dont Diana a dit : « Il ne faut jamais corriger une personne atteinte de démence. Cela ne fonctionne pas. » C’est l’une de mes phrases préférées, et j’ajouterais : « ne corrigez pas, établissez un lien ». En établissant un lien avec la personne, en validant ce qu’elle ressent, on parvient à tisser un lien émotionnel à un autre niveau. Si quelqu’un pose sans cesse la même question, validez simplement : « Vous tenez vraiment à ce que nous nous rendions à ce rendez-vous. Vous souvenez-vous de la dernière fois où nous y sommes allés? Nous avions ensuite dégusté une glace et nous avons vu ces enfants? Vous aimez bien voir des enfants, n’est-ce pas? » Une sorte de petit lien émotionnel. Plongez-vous dans l’univers de la personne atteinte de démence. Ne la corrigez pas.

Allison Sekuler :
Même sans rendez-vous, plongez-vous dans son univers et reconnaissez où elle se trouve à ce moment-là.

Nicole Didyk :
Absolument. Validez le fait que son inquiétude est réelle, puis passez à autre chose en établissant un lien émotionnel.

Jay Ingram :
Nicole, vos conseils ont été très utiles. Nous vous remercions sincèrement de vous être jointe à nous pour aider à défier la démence. Merci.

Allison Sekuler :
Oui, merci.

Nicole Didyk :
Merci à vous.

Jay Ingram :
Nicole Didyk est gériatre consultante à l’hôpital Memoriale de Cambridge, en Ontario. Elle nous a parlé depuis Waterloo, en Ontario.

Allison Sekuler :
Jay, nous avons appris beaucoup de choses intéressantes. Quelle est ta réaction face à tout ce que nous venons d’entendre?

Jay Ingram :
Je pense que le mot « beaucoup » est important, Allison. Il décrit assez précisément ce que nous avons entendu, car il existe une variété incroyable de comportements que de nombreux proches aidants connaissent bien, je pense, comme poser sans cesse la même question, un comportement plus ou moins facile à comprendre et à gérer.

Il y a cependant l’autre extrémité du spectre. Dans l’émission, nous avons entendu parler d’insultes et d’objets lancés. Il est très difficile de tout englober et de trouver une stratégie pour tous les cas. Je ne pense pas que cela soit vraiment possible. Selon moi, le message important que nous avons entendu aujourd’hui est qu’il faut essayer de comprendre. Même si les comportements peuvent être très variés, il faut tenter de savoir d’où ils viennent, ne pas oublier le fait qu’ils sont très probablement liés à quelque chose, et être capable de réagir calmement face à des situations parfois très difficiles.

Allison Sekuler :
Oui. Il ne s’agit pas de toujours corriger les actions d’une personne, même si vous comprenez sa pensée et qu’elle ne correspond pas à la réalité. Nos deux invitées ont souligné qu’il ne faut pas corriger une personne atteinte de démence. J’ai particulièrement aimé le mantra de Nicole : « ne corrigez pas, établissez un lien ». Nous avons déjà entendu cela auparavant : il faut plonger dans l’univers de la personne, adopter son point de vue, sa perspective, pour mieux la comprendre. Cela permet également d’atténuer certains symptômes. En réalité, cette philosophie s’applique à toutes les relations humaines. Essayer de comprendre le point de vue de l’autre et établir un lien avec lui de cette manière.

Jay Ingram :
Je voudrais juste ajouter rapidement que nous ne prétendons pas que cela est facile.

Allison Sekuler :
Non.

Jay Ingram :
En effet, si vous vous sentez mis au défi ou même menacé, il est assez difficile de prendre du recul mentalement et de se dire : « Je vais simplement essayer de comprendre et d’établir un lien. » Mais en fin de compte, c’est la meilleure chose à faire.

Allison Sekuler :
Je pense qu’un autre aspect important est que, lorsque quelqu’un adopte ces comportements, les gens disent souvent que leur mère, leur grand-mère ou une autre personne proche a tenu des propos très blessants. Cela peut vous amener à percevoir cette personne différemment ou à penser qu’elle vous perçoit différemment. Il est essentiel de se rappeler que ce n’est pas vraiment la personne qui est en cause, mais la maladie. Encore une fois, ce n’est pas facile à faire. Mais, comme Diana le mentionnait, plus vous arrivez à reconnaître que le problème ne vient pas de vous, mais que c’est la maladie qui provoque ces comportements, mieux c’est. Je pense que c’est très important que les gens comprennent cela.

Pour en savoir plus sur la manière de renforcer la santé du cerveau et de réduire le risque de démence, ou d’en ralentir la progression, visitez notre site, defierlademence.org. Vous y trouverez les autres épisodes du balado, ainsi que nos vidéos, des images infographiques et d’autres ressources.

Jay Ingram :
Nous tenons à remercier la Docteure Yael Goldberg du Centre Pamela et Paul Austin sur la neurologie et le soutien comportemental de Baycrest pour son aimable collaboration à cet épisode. Nous remercions également Rebecca Lemieux, infirmière clinicienne spécialisée en gériatrie aiguë à l’hôpital Mount Sinai de Toronto.

Notre équipe de production pour ce balado est composée de Rosanne Aleong et Sylvain Dubroqua. La production est assurée par PodTechs. La musique a été composée par Steve Dodd et le dessin pour la page couverture a été réalisé par Amanda Forbis et Wendy Tilby. Notre rédacteur et réalisateur associé est Ben Schaub.

Allison Sekuler :
Nous tenons à remercier la fondation de la famille, de même que le Centre d’innovation sur la santé du cerveau et le vieillissement, et Baycrest, qui ont financé ce balado.

Nous vous sommes très reconnaissants de votre soutien, alors n’hésitez pas à vous abonner à Défier la démence, quelle que soit la plateforme où vous écoutez vos balados. N’oubliez pas de laisser un « J’aime », un commentaire ou une note de cinq étoiles.

Jay Ingram :
La prochaine émission de Défier la démence sera consacrée aux dernières nouvelles. Allison et moi-même allons nous pencher sur certaines actualités importantes liées à la santé du cerveau qui n’ont pas encore été abordées dans ce balado.

Allison Sekuler :
Nous allons également réfléchir à ce que nous avons appris jusqu’à présent en animant cette émission et en organisant des événements ambulants de Défier la démence à travers le pays et autour du monde. Tout comme vous, nous faisons de notre mieux pour préserver notre cerveau et réduire le risque de démence. Mais, comme vous le constaterez lorsque nous en discuterons, nous sommes aussi des êtres humains. C’est ce que nous verrons la prochaine fois à Défier la démence. Je m’appelle Allison Sekuler.

Jay Ingram :
C’est rassurant de savoir que nous sommes des êtres humains. Je m’appelle Jay Ingram. Merci d’avoir écouté Défier la démence, et n’oubliez pas : il n’y a pas d’âge pour prendre soin de son cerveau.